Il existe environ une centaine d'espèces toxiques et environ entre 15 et 20 espèces mortelles. Nous notons prés de 2000 cas d'intoxications par an surtout en septembre-octobre selon les statistiques des consultations médicales.
Les intoxications
ont généralement plusieurs étiologies. soit
1°) une action toxique directe
2°) une contamination microbienne
3°) une pollution par des pesticides, des métaux lourds (cadmium,plomb,mercure
etc…..) ou par radioactivité.
Plusieurs repas successifs et en grande quantité de champignons comestibles
peuvent provoquer une indigestion qu'il ne faut pas confondre avec une intoxication.
Le diagnostic différentiel est parfois difficile car les signes cliniques apparaissent
1 ou 2h après les repas. Il faut également bien observer les espèces, car dans
un même panier il peut y avoir des espèces à délai long et des espèces à délai
court.
Il faut signaler
deux grands groupes d'intoxications
a) Les syndromes à délais courts, c'est-à-dire,dont
l'apparition des signes cliniques se situe entre 3h et 6h après les repas.
b) Les syndromes à délais longs, pour lesquels
les signes cliniques sont décelés 6h et parfois 48h après les repas.
In fine, nous parlerons également de certaines intoxications totalement étrangères à la propre toxine du champignon.
1°)
Syndrome Gastro-intestinal et Résinoïdien
Les signes cliniques apparaissent environ 2 à 3h après les repas et sont
décrits comme une pathologie gastro-intestinale classique.
Le syndrome résinoïdien est un syndrome gastro-intestinal plus grave dont on
reparlera plus loin. Il faut noter des nausées, des vomissements, des diarrhées
+ ou - importantes. Tous ces troubles peuvent prendre des proportions graves
selon l'état clinique antérieur de la personne intoxiquée .Le vieillard,
l'enfant, la femme enceinte sont autant de cas à risques graves .
Il existe également des réactions idiosyncrasiques, à savoir des façons différentes
de chaque individu,à réagir vis-à-vis de la même toxine. De nombreuses intoxications
gastro-intestinales sont également dues à une quantité excessive de champignons
contenant de la chitine,du mannitol,ou de la tréhalose. On note souvent chez
certains intoxiqués un déficit marqué en tréhalase ( qui détruit la tréhalose)
La tréhalose est un hydrate de carbone présent dans certains champignons et
qui par hydrolyse ( tréhalase ) se décompose en deux molécules de glucose.
Toxines
thermolabiles :
Comme leur nom l'indique, elles sont détruites par la chaleur, et, ingérées
crues, provoquent une hémolyse ( destruction des globules rouges ).
Les champignons responsables sont en particulier : Boletus luridus, Boletus
erythropus, Amanita rubescens, Amanita spissa, Amanita vaginata, Amanita strobiliformis,
certaines Russules, Lepista nebularis, certains Lactaires ( torminosus par ex….)
Morchella, Lepista nuda, Entoloma clypeatum etc....
Toxines
non thermolabiles:
Elles ne sont pas détruites par la chaleur et provoquent un syndrome résinoïdien
dont les symptômes gastro-intestinaux sont beaucoup plus graves et relèvent
d'une hospitalisation urgente. Nous citerons, par exemple, la bolesatine, l'illudine,
le fasculol, le crustulinol. Il faut également noter la présence fréquente de
dérivés triterpéniques et sesquiterpéniques,souvent encore inconnus.
Parmi les champignons incriminés, nous citerons les plus fréquents : Entoloma
lividum, Omphalotus olearius, Omphalotus illudens, Ramaria formosa, Tricholoma
pardinum etc….
Le syndrome gastro-intestinal est le plus fréquent et peut provoquer en raison d'une diarrhée importante et de vomissements incoercibles chez la personne âgée et l'enfant une déhydratation aigüe et un déséquilibre hydro-électrolytique. Le traitement comporte une réhydratation per os ou par voie parentérale si le déficit est trop important. Le plus souvent cette pathologie disparaît en 48h.
2°) Le
Syndrome Muscarinien
(également appelé sudorien ou cholinergique).
La toxine impliquée est la muscarine qui agit sur les fibres musculaires lisses
et sur les glandes endocrines.
Les champignons responsables sont en particulier, Clitocybe dealbata, Clitocybe
rivulosa, Clitocybe cerussata, Inocybe Patouillardii, Inocybe fastigiata, Inocybe
geophylla, etc.....
Les signes cliniques sont d'origine cholinergique et se traduisent par une bronchoconstriction
pouvant entrainer un encombrement pulmonaire, une bradycardie, des troubles
digestifs, une hypotension artérielle, un myosis, un épisode de sueurs
intenses,de larmoiement, d'hyper salivation. Tous les inocybes sont à rejeter.
Le traitement est basé sur une réhydration par perfusions et par des injections
d'atropine à petites doses pour ne pas déclencher une hyper atropinisation.
En effet l'atropine est un alcaloïde de la belladone qui est une plante toxique.
L'acétylcholine a une structure proche de la muscarine qui active de façon durable
les récepteurs de l'acétylcholine qui est un messager chimique des neurones,
et dont l'atropine agit de façon contraire.
3°) Le
syndrome Panthérinien
La toxine incriminée
comporte des dérivés isoxazoles.
L'acide iboténique et le muscimol agissent sur le récepteur du GABA (acide gamma
amino butyrique ) pour donner la muscazone. En fait il s'agit d'un mécanisme
mycoatropinien,muscarien et anticholinergique opposé au syndrome muscarinien
qui est acétylcholinergique. Du point de vue clinique les troubles digestifs
sont à peu prés ou totalement absents. Nous notons une excitation du système
nerveux central avec une ébriété, une euphorie, une obnubilation, une agitation,
et surtout un délire avec hallucinations. Dans un deuxième temps apparaissent
une prostration et une somnolence. Ces troubles sont recherchés par les toxicomanes
et sont souvent responsables d'intoxications graves.
Les champignons responsables sont en particulier l'Amanita muscaria,l'Amanita
pantherina,l'Amanita junquillea.Une phase de torpeur survient après la phase
d'hallucination.
Le traitement est souvent basé de sédatifs et d'anticonvulsivants (benzodiazépines
et diazépam ). Il est évident que l'atropine est fortement contre-indiqué.
4°) Le
Syndrome Coprinien
La toxine incriminé est la Coprine qui contient un métabolite le 1-aminocyclopropanol
et un N-( 1-hydroxycyclopropyl).
En fait les troubles vasomoteurs,que nous verrons plus loin,s'expliquent facilement.
Il se produit un blocage de la transformation de l'acétyldéhyde (métabolite
de l'éthanol ) en acétate, et il y a accumulation de l'acétaldéhyde dans le
sang et le foie. Le 1-aminocyclopropanol inhibe l'alcool déshydrogénase de manière
irréversible comme le médicament utilisé en médecine pour traiter l'alcoolisme
chronique qui est l'Espéral ( disulfurame ).
Le champignon est Coprinus Atramentarius coprin noir d'encre. Les symptômes
n'apparaissent que s'il y a prise d'alcool. C'est ainsi que l'on peut assister
à une reprise des signes cliniques plusieurs jours après la consommation de
ce coprin. Aprés avoir fait ce diagnostic sur un de mes patients,ce dernier
est revenu me consulter 9 jours après en me disant que tous les symptômes
étaient réapparus alors qu'il n'avait plus mangé de champignons. Le docteur
Giacomoni (toxicologue de renom ) m'avait signalé un cas récidivant pratiquement
10 jours après, sous l'effet de l'alcool sans renouveler la consommation de
coprin.
Les signes cliniques sont caractéristiques de l'effet Antabuse,avec une rougeur
de la face, du thorax et du cou,une tachycardie, des palpitations, des nausées
et des vomissements. Il est absolument conseillé de ne plus boire d'alcool pendant
au moins 10 jours après un repas de coprinus atramentarius. Parfois l'usage
d'un bêta bloquant est nécessaire pour éviter un risque de collapsus en
raison des troubles du rythme cardiaque. Le plus souvent tous ces signes disparaissent
spontanément en 12 à 24h.
5°) Le
syndrome PSILOCYBIEN
Le syndrome psilocybien résulte de la consommation involontaire, mais souvent
volontaire, de certains champignons hallucinogènes.
Les champignons incriminés sont Psilocybe semilanceata,callosa, cubensis, cyanescens,
certains paneolus, pholiotina etc. qui ont été classés comme stupéfiants selon
l'arrêté du 22 février 1990.
La toxine responsable est la PSILOCYBINE. La psilocybine se transforme sous
divers métabolismes en psilocine qui possède une action sérotoninergique. Le
diagnostic est souvent confirmé par la présence de l'acide 4- OH- indolacétique
dans les urines. Cette toxine comporte un ester phosphorique, le 4-HYDROXYDIMÈTHYLTRYTAMINE,
et un alcaloïde de type Indol avec un radical d'acide phosphorique qui est le
principe actif de certains champignons hallucinogènes. La psilocybine a été
découverte en 1958 par Albert Hofmann à partir de sclérotes de Psilocybe mexicana.
Les symptômes surviennent environ 30 minutes après la consommation de ces champignons
frais ou séchés,et se caractérisent pendant 3 à 6h par de l'euphorie, troubles
de la vision colorée, hallucinations visuelles, auditives et tactiles, une désorientation
temporo-spatiale, avec une modification des pensées et des sentiments. La vision
colorée donnent l'impression d'un kaléïdoscope où l'usager se perd dans un monde
imaginaire. Après cette impression de " voyage " selon le vocabulaire
des toxicomanes (semblable aux effets du LSD ) il survient un épisode de panique,
d'angoisse, de tachycardie et d'hypertension artérielle. Il est souvent
signalé une violence incontrôlée avec quelques cas de décès
après convulsions, coma prolongé,infarctus du myocarde. De plus l'on ignore
les possibles séquelles tardives et lointaines au niveau du système nerveux
central et du coeur.
Le traitement consiste en première intention en une prise en charge psychiatrique
basée sur les benzodiazépines en vue de calmer les hallucinations et l'agitation
qui peuvent conduire à des actes incontrôlés.
6°) Le
syndrome PAXILLIEN
La toxine est inconnue,il
s'agit plus exactement d'une allergie après plusieurs repas du champignon incriminé.
L'examen sanguin révèle des troubles du taux des IgG.
Le champignon est le PAXILLUS Involutus consommé en Cerdagne, encore de nos
jours, en saumure, le plus souvent.
Les signes cliniques sont :nausées, vomissements, mais surtout une anémie hémolytique
prouvée par le comptage des hématies, par la baisse du taux d'hémoglobine, et
surtout par le test d'hémagglutination positif.
Le traitement consiste dans les cas sévères en une exsanguino-transfusion,parfois,
en une épuration extra- rénale, ou à une plasmaphérèse (opération consistant
en une séparation du plasma et des globules rouges ).
1°) Syndrome
PHALLOÏDIEN
A tout seigneur tout honneur : Il s'agit du syndrome toxique le plus grave,le
plus sévère dont la mortalité est d'environ 15% selon la plupart des auteurs.
Le seul cas que j'ai été amené à diagnostiquer a été sauvé dans un hôpital parisien
par une greffe hépatique avec des résultats très satisfaisants. Le temps d'incubation
se situe entre 6 à 36h.
Les champignons en cause sont AMANITA PHALLOÏDES dans 90% des cas,mais également
Amanita verna, virosa, decipiens, Lepiota brunneolilacina, brunneoincarnata,
helveola, helveolonides,josserandi, subincarnata, pseudohelveola, Galerina marginata,
autumnalis, venata, Pholiotina filaris,etc....
Les doses létales se situent autour de 30 à 50g pour amanita phalloïdes, 100g
pour les lépiotes et 100 à 150g pour les galerina. Èvidemment toutes ces notions
varient pour chaque consommateur en fonction de son état antérieur, de
ses antécédents pathologiques et de ses propres défenses.
La toxicité est marquée par plusieurs éléments :
a) les Amatoxines qui sont des octapeptides bicycliques thermostables,
résistantes à la dessiccation et responsable de l'hépatite toxique souvent dite
fulminante.
Il existe 9 amanitines : a-amanitine, b-amanitine, g- amanitine, e-amanitine,
amanilline,acide amanullique, pro-amanulline, amanine, amaninamide.
Leur action princeps est une inhibition complète de l'ARN polymérase ( transcription
de l'ADN en ARNm ).
b) les Phallotoxines
( heptapeptides bicycliques ) au nombre de 7 : phalloïdine, phalloïne,pro- phalloïne,
phallisine, phallicine,phallicidine, phallisacine.
Elles augmentent la destruction du réticulum endoplasmique et des mitochondries
hépatocytaires. De plus, elles se lient avec l'actine et provoquent ainsi une
augmentation de la perméabilité membranaire, un oedème, et la mort cellulaire.
La Phallolysine est thermolabile et provoque une hémolyse chez l'animal.
C) Les
virotoxines : Elles sont au nombre de 5 :alaviroïdine, viroïsine, déoxoviroïsine,
viroïdine, et déoxoviroïdine dont la toxicité est comparable aux phallotoxines.
L'action de ces toxines se situent en particulier au niveau du foie comme premier
messager et entraîne une cytolyse spectaculaire. Les premiers signes cliniques
sont des troubles digestifs très importants avec des vomissements incoercibles
et surtout une diarrhée de type cholériforme fétide. Nous assistons alors à
une forme de rémission de 2 ou 3j avec une nette augmentation des transaminases
et des gamma gt. L'état clinique s'aggrave avec l'apparition d'un ictère, d'une
hépatomégalie de 2 ou 3 débord par rapport aux côtes. La destruction hépato-cellulaire
est alors intense avec des risques d'hémorragie digestive, d'encéphalopathie
d'origine hépatique,d'hypoglycémie.
Nous devons toutefois signaler 3 formes de gravité selon l'état physique antérieur
de l'intoxiqué ( également en rapport avec l'âge,la grossesse, la réponse idiosyncrasique
de chaque individu et surtout la quantité de champignon consommé ) :
- Forme bénigne :
Il s'agit d'une gastro-entérite très importante avec diarrhée et vomissements
et surtout douleurs abdominales intenses.Une petite atteinte hépatique peut
survenir sans atteinte cellulaire majeure.
- Forme moyenne :
L'examen clinique et biologique révèle une hépatite aiguë qui évolue vers
la guérison en 2 à 3 semaines.
- Forme grave : Il s'agit là de la présence de signes sévères d'hépatite aiguë
avec des taux de transaminases très élevés de l'ordre de 2000 U et souvent beaucoup
plus !!! le taux normal étant de 5 à 37 pour ASAT et de 5 à 40 pour ALAT. Le
dosage des Gamma gt peut également être significatif et atteindre 2000 ( normal
entre 11 et 43 ).
Le traitement consiste en une réanimation sérieuse en milieu hospitalier avec
une épuration rénale et une antibiothérapie à hautes doses. L'indication de
silymarine est une bonne thérapeutique pour la protection de la cellule hépatique.
Dans certains cas l'on peut noter une rémission,mais dans 15% des cas il y a
décès. Il s'agit alors d'une destruction hépato-cellulaire grave
pour laquelle une greffe hépatique peut être envisagée. Dans certaines rémissions,l'on
peut noter des séquelles d'hépatites chroniques plus ou moins actives.
2°) Syndrome
ORELLANIEN
Les signes cliniques apparaissent entre 24 à 36h après le repas. Le début est
caractérisé par des troubles digestifs, vomissements, diarrhée, douleurs abdominales
et il s'ensuit une légère rémission plus ou moins trompeuse, car ,au bout de
8 à 10 jours la symptomatologie revêt un tout autre aspect. Sècheresse buccale,
reprise des troubles digestifs, sueurs, frissons, céphalées, myalgies diffuses
et surtout une oligo-anurie pathognomonique d'une insuffisance rénale gravissime.
Du point de vue histologique, nous sommes en présence d'une destruction et d'une
nécrose de l'épithélium tubulaire avec oedème interstitiel et fibrose.
Le traitement comporte des furasémides, une antibiothérapie, une hydratation
suffisante et parfois une transplantation rénale.
Les TOXINES incriminées sont :
L'Orellanine et l'Orellinine qui sont des bipyridyliques.
Par contre l'Orelline n'est pas toxique. L'orellanine présente une extraordinaire
stabilité et elle est thermostable. Cette toxine a été retrouvée intacte dans
un cortinaire couleur de rocou vieux de 60 ans. L'orellanine toxique pour les
cellules rénales,donne naissance à une quantité importante de radicaux libres.
Le rein est le principal organe cible.
Les champignons responsables sont : Cortinarius Orellanus (couleur de rocou
), Cortinarius Orellanoïdes, Speciosissimus,etc…
3°) Syndrome
GYROMITRIEN
Les signes cliniques peuvent être bénins ou très graves selon la quantité de
champignon ingérée. Les premiers symptômes, à savoir,les troubles digestifs
(nausées, vomissements, douleurs abdominales, peuvent disparaître rapidement
si l'intoxication est légère. Par contre, des troubles nettement plus graves
au bout de 36 à 48h peuvent se manifester : une hépatite par exemple, des signes
neurologiques (confusion, somnolence, tremblements, délire ) une pathologie
sanguine avec une hémolyse, et souvent une insuffisance rénale.
Le traitement est à base de perfusions de vitamine B6 ( pyridoxine ) associées
à des anticonvulsivants comme le diazépam ).
La toxine responsable est la Gyromitrine dont la formule chimique est :N- METHYL-
N- FORMYLHYDRAZONE qui se transforme en MONOETHYLHYDRAZONE dans l'organisme.
Ce dernier est un antagoniste de la vitamine B6 ou pyridoxine. Les troubles
neurologiques sont expliqués par la baisse du taux intracellulaire en Gaba.
Le monométhylhydrazone contenu dans la gyromîtrine est un composant du carburant
des fusées. L'inhalation de ce produit provoque des troubles identiques à la
consommation de gyromître. C'est la raison pour laquelle une maladie professionnelle
a été reconnue chez les ouvriers travaillant sur les bases de lancement.
Les champignons responsables sont Gyromitra esculenta, Gyromitra gigas, Gyromitra
infula, Helvella crispa, et lacunosa.
4°)
Syndrome de Rhabdomyolyse
Avant l'année 2000 lorsqu'on me présentait un panier de tricholome équestre
à déterminer ,je conseillais de le déguster et d'en faire un plat succulent.
Depuis cette date, les choses ont bien changées et Tricholama equestre est devenu
un champignon hyper dangereux au point que sa cueillette est interdite et à
fortiori sa vente. En l'année 2000, 3 cas mortels sont signalés dans les Landes
après consommation répétée et copieuse de BIDAOU nom vernaculaire du tricholoma
equestre dans le sud ouest. Il est fréquent de dire " on va au Bidaou " comme
on dit on va " aux cèpes ". Malgré de nombreuses hypothèses,la toxine est encore
mal connue bien que les travaux de la faculté de Bordeaux, avancent de façon
remarquable. Il semblerait que les pigments jaunes de ce champignon soit la
base de cette toxine. Les signes cliniques sont assez bâtards au début car ils
peuvent faire penser à un certain nombre de pathologies incipiens. L'on note
des douleurs au niveau des épaules et des hanches pouvant ressembler à des courbatures
ou à des douleurs rhumatismales. En fait il s'agit en réalité de douleurs musculaires
dues à une destruction des muscles striés. Il n'y a pas d'atteinte des muscles
lisses. L'aggravation se propage alors sur tous les muscles avec la libération
des enzymes et de la myoglobine des cellules musculaires. Il n'y a pas de signes
digestifs,ni de fièvre. Par contre la destruction des muscles striés se généralisent
et provoque une rhabdomyolyse pour atteindre le coeur et les bronches,et entraîner
la mort. Du point de vue biologique, l'augmentation de la créatine kinase (
CPK ) est très importante ( de l'ordre de 1500 à 2000 ). A mon sens cette intoxication
relève d'une consommation importante de tricholoma equestre ou auratum ou flavovirens
et d'une certaine sensibilité individuelle.
5°)
Le Syndrome PROXIMIEN
Il est la conséquence de la consommation d'amanites dites à volve rousse, bien
que cette terminologie ne me plaise pas trop. En effet Amanita proxima possède
une volve rousse dés sa cueillette, mais sa soeur Amanita ovoïdea a une volve
blanche qui devient rousse au bout de 48h. Je préfère les différencier par leur
anneau. En effet celui d'Amanita ovoïdea est friable, fugace, et crémeux. Par
contre celui d'Amanita proxima est tenace,membraneux, et ample. Bien qu'ovoïdea
soit considérée comme non toxique, il est recommandé de les rejeter toutes les
deux pour éviter une éventuelle confusion. Aux USA le champignon incriminé est
Amanita Smithiana qui a les mêmes caractéristiques.
La toxine n'est pas connue. Les signes cliniques débutent entre 2 à 48h après
les repas et se manifestent par des troubles digestifs, vomissements, diarrhées,
douleurs abdominales. Il faut noter parfois une insuffisance rénale aiguë
plus ou moins fugace vers le 4ème jour. L'évolution est très souvent
favorable en 3 semaines, si la quantité de champignons consommée est peu importante.
Le traitement comporte un traitement antispasmodique associé à une réhydratation
très sérieuse pour relancer la fonction rénale.
6°) Le
Syndrome ERYTHERMALGIQUE ou Acromèlalgien ou Acrosyndrome
Il s'agit d'un syndrome
très curieux découvert au Japon apparaissant entre 5 et 7 jours après le repas.
Les signes sont tout à fait caractéristiques avec une sensation de brûlures
et de douleurs suraiguës et insupportables au niveau des extrémités. Ces
douleurs atteignent un paroxysme la nuit et ne sont calmées que par des bains
d'eau glacée dont l'abus peut provoquer des effets néfastes comparables à des
gelures comme " les pieds de tranchées ". Les antalgiques n'ont strictement
aucun effet y compris ceux de la classe 3 ( les dérivés morphiniques ). Il se
produit une régression au bout de 1 à 3 mois mais certains auteurs ont décrit
des séquelles pendant de très nombreux mois et années, caractérisées par une
douleur lors d'un laçage trop serré des chaussures.
La toxine comportent des acides acroméliques Aet B; des acides hétéroaromatiques
de la famille des Kanoïdes de stucture proche de l'acide L-glutamique.
Les champignons responsables sont au Japon Clitocybe acromelalga.En France il
s'agit de clitocybe Amoenolens que l'on rencontre surtout dans les Alpes.
7°) Le
syndrome de SZECHWAN
Le
syndrome de SZECHWAN est un syndrome toxique découvert récemment
en 1981 environ. Il ne s’agit pas du nom d’un auteur mais d’une région
de Chine appelée Sse-Tch’ouan. Le champignons incriminé est l’oreille
de Judas ou plus scientifiquement Auricularia auricula judae.
Pourtant ce champignon est utilisé en médecine traditionnelle
chinoise dans toutes les pathologies caractérisées par la présence
de thromboses à n’importe quel niveau circulatoire. L’on peut citer comme
exemples : les phlébites (thrombose des membres inférieurs en
particulier) les thromboses hémorroïdaires où les résultats
sont spectaculaires et prouvés, médicalement et scientifiquement.
De 1981 à 1983 de nombreux auteurs ont défini la formule de cet
élément qui fluidifie le sang en provoquant une baisse des thrombocytes
ou autrement dit des plaquettes. Ces plaquettes entrent dans le cycle de la
coagulation du sang. Nous employons de nos jours dans ces mêmes maladies
des médicaments plus modernes et mieux adaptés pour combattre
l’hypercoagulabilité sanguine mais ayant la même action.
Il s’agit d’un polysaccharide décrit par UKAI en 1981 et CERUTI en 1986.
En fait en 1981 l’équipe de MISAKI aurait donné déjà
une formule qui est restée contemporaine et qui signale ce polysaccharide
comme contenant deux glucanes dont une seule fraction serait active (1-3 D glucane
selon UKAI dans les années 1983).
Il faut cependant noter une découverte importante en 1981 par deux chercheurs,
BAILEY et MAKHEJA. En effet ces auteurs ont démontré la
présence d’un adénoside qui provoquerait une altération
de l’AMP cyclique et donnerait par conséquent la constitution d’un éventuel
caillot ou thrombose par agrégation des thrombocytes.
DECOUVERTE de la TOXICITE
de ce CHAMPIGNON
Ce syndrome toxique n’était absolument pas connu par les mycologues avant
les dates précitées. En effet ce n’est que par empirisme qu’un
médecin spécialisé dans les maladies du sang et exerçant
aux USA fut étonné par un accroissement important de malades présentant
des phénomènes de saignements. Or en médecine de cabinet
ces troubles de la coagulation peuvent être pathognomoniques de
maladies extrêmement graves d’origine septicémiques ou cancéreuses,
ou banales comme la prise de médicaments comme l’aspirine ou des anti
inflammatoires utilisés souvent à fortes doses et même à
petites doses mais pendant très longtemps.
Mais la perspicacité
de ce médecin associé à son sens de la recherche épidémiologique
lui a permis, après un interrogatoire minutieux, au cas par cas, de découvrir
l’origine de cette pathologie. Les troubles se manifestaient en particulier
par des gingivorragies (inflammations et saignements des gencives). Le
docteur HAMMERSCHMIDT puisque c’est de lui qu’il s’agit, avait remarqué
que tous les patients qui présentaient ces troubles mangeaient pratiquement
tous les jours et souvent matin et soir dans des restaurants chinois des soupes
avec des champignons noirs c'est-à-dire des oreilles de Judas,
des Auricularia Auricula Judae.
Le syndrome toxique de Szechwan ou syndrome purpurique était découvert.
Le purpura est un saignement sous cutané.
TRAITEMENT du Syndrome
de Szchewan :
Le traitement est banal et ne comporte que des soins symptomatiques comme la
vitamine K ( si l’hémorragie est importante ) et surtout l’arrêt
de l’ingestion de ce champignon.
Comme vous avez pu le remarquer cette intoxication ne peut survenir qu’après
une ingestion particulièrement importante d’oreilles de Judas et surtout
à des repas souvent répétés comme nous le verrons
dans un autre chapitre d’ailleurs avec d’autres champignons.
Nous avons envisagé à peu prés tous les syndromes toxiques connus de nos jours mais la liste n'est pas définitive à mon sens je suis persuadé que nous verrons apparaître dans les années futures d'autres pathologies. En effet il pourrait y avoir des risques de transformations génétiques encore mal élucidés de nos jours.
Quoiqu'il en soit il faut signaler certaines intoxications totalement étrangères à la propre toxine du champignon.
1°) les PESTICIDES en particulier dans les agarics et également dans les champignons cueillis prés de champs cultivés.
2°) les MÉTAUX et en particulier les métaux lourds dont les effets ne sont pas immédiats en général, mais plutôt à long terme. Les champignons qui en absorbent le plus sont Laccaria amethistina pour l'arsenic, agaricus campestris pour le cadmium et le mercure, Macrolepiota rhacodes et Lepista nuda pour le plomb. Il faut noter une absorption de tous les métaux lourds par certains champignons comme Cantarellus lutescens et Cantarellus tubaeformis, bien que bon comestibles.
3°) Les
RADIOÉLÉMENTS
Depuis la catastrophe de Tchernobyl et l'explosion de la centrale nucléaire
de nombreux cas de cancers de la thyroïde ont été signalés et les champignons
irradiés à partir de 600 Becquerels et plus, sont interdits à la consommation
et à la vente.
Il existe 4 groupes de champignons radiosensibles.
- a) Ceux qui présentent moins de 100 Bq comme Agaricus spp,Armillaria spp,
Coprinus comatus, Leucocoprinus spp, Macrolepiota spp.
- b) Ceux qui ont subi de façon sensible en 1986 les radiations de Tchernobyl
au-delà de plusieurs milliers de Becquerels mais qui, depuis, sont beaucoup
moins contaminés et se situent en dessous de 600 Bqs. Je dois toutefois remarquer
que certains champignons à mycellium profond voient leur radioactivité remonter
à des taux qui paraissent relativement inquiétants. Il faut noter notre bon
Boletus Edulis ou cèpe de Bordeaux. Cette mesure au compteur Geiger devra être
suivie de façon régulière.
Dr Charly HAIECH
Pt de l’association mycologique Cérétane
PS. Bien que n'étant
stricto sensu pas une maladie de mycologue, ce dernier peut sans doute plus
que d'autres naturalistes, parce que souvent à quatre "pattes"
dans les herbes, héberger qqles hôtes indésirables, dont
les redoutables tiques, véhiculant quelques peu aimables pathologies.
Lire à ce sujet la page "attention aux tiques", dans le "coin
des débutants", "comment récolter", éventuellement
directement sur ce lien:
Attention
aux tiques